Annette Kerjean (1901-1985)

Dernière mise à jour : 17 juillet 2017
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Les mariages américano-finistériens de 1919-1920, n’ont pas tous été célébrés à Brest. Certains l’ont été au Relecq-Kerhuon. C’est, par exemple, celui de William Francis ROGERS et de Annette Ernestine KERJEAN, le 29 novembre 1919 (cf. acte de mariage). Cette dernière était une cousine germaine du demi-frère de ma grand-mère.

Annette habitait le hameau de Keriezou, au Relecq-Kerhuon, juste en bordure de l’hôpital américain n°65, situé à Feunteun Aon, en bordure de la rade de Brest(*), à l’ouest de la commune (voir cartes). C’est là que stationnait William en 1919. Originaire de Cambridge, dans le Massachussets, il était journaliste de guerre et dépendait du corps médical de l’armée.

(*) La plage des Sables Rouges, en contrebas, doit son nom à la couleur que le sable avait pris durant plusieurs mois, suite aux jets de boîtes de conserves vides qui s’y étaient oxydées.

William F. ROGERS et Annette KERJEAN (1919)

Annette avait 18 ans lorsqu’elle fit la connaissance de William (cf. acte de naissance). Celui-ci avait dix ans de plus qu’elle. Annette était la quatrième enfant d’une famille de sept. Son père, Yves KERJEAN, poudrier au Moulin Blanc, était mort en 1917 à l’âge de 49 ans. Les parents de William, Manuel et Mary Julia ROGERS, originaires du Portugal, avaient émigré aux États-Unis. Manuel ROGERS avait exercé la profession d’ébéniste à Cambridge dans le Massachusetts. Les deux parents de William étaient décédés au moment du mariage de celui-ci avec Annette.

Craignant de paraître trop âgé pour sa fiancée, William a triché sur son âge. Lors du mariage, il a déclaré être né le 8 juin 1893 alors qu’il était né, en réalité, deux ans plus tôt, comme l’atteste son acte de naissance. Annette n’apprendra son âge réel que bien plus tard, en Amérique.

Peu de temps après leur mariage, William a été muté dans un autre hôpital, à Coblence en Allemagne. Il y a effectué encore six mois de service avant d’être libéré de ses obligations militaires, en juin 1920.

USS Pocahontas en 1919
Photo US Naval Historical Center

Annette est arrivée aux États-Unis le 12 août 1920, à bord du Pocahontas, comme l’atteste l’enregistrement de son passage par Ellis Island.

Le couple s’est installé dans la région de Boston. William est devenu découpeur de viande dans une épicerie. Annette s’est spécialisée dans la couture de fourrure. Leur fille unique, Madeleine, est née en 1922.

Lorsqu’elle est arrivée aux Etats-Unis, Annette parlait très peu l’anglais. Elle s’est mise à l’apprendre, notamment en faisant des mots-croisés. Elle a longtemps conservé son accent français et était très fière d’être française. Elle s’est liée d’amitié avec deux autres françaises mariées à des soldats américains : Marie Louise LEEDEN et Marie WINTERS.

Le couple ROGERS (William et Annette) et le couple LEEDEN (Adrianus et Marie Louise) étaient de tellement bons amis qu’ils ont choisi d’être enterrés les uns auprès des autres afin d’être voisins pour toujours. Marie Louise, née DESVAUX, était originaire de la région d’Angers. Adrianus, né aux Pays-Bas, était américain depuis sa naturalisation vers 1915.

Annette s’est rendue en France à plusieurs reprises. Elle aurait certainement voulu venir plus souvent mais le voyage était cher et le couple devait faire des économies avant que cela ne soit possible. Leur fille, Madeleine, l’a accompagnée à deux reprises : en 1926 puis en 1931. Une partie de la visite avait lieu chez la sœur aînée d’Annette, Jeanne, épouse PICHON, à Compiègne. Annette avait aussi un frère au Havre. Son autre frère et ses trois autres sœurs sont restés dans la région brestoise.

Les sœurs Kerjean vers 1957. De gauche à droite :
Madeleine, Marie Françoise (Mimie), Annette et Jeanne
Au premier rang : Martine Pichon, petite fille de Jeanne.

Annette était très liée à ses sœurs (voir ci-contre). Lorsqu’elle venait en Bretagne, elle rendait visite à Madeleine, veuve de Désiré GRALL (tué par les allemands en 1944), qui vivait à Saint-Marc et Marie Françoise (Mimie), épouse de Joseph QUILLIEN, qui vivait rue de Kerbloas à Lambézellec. C’est là que, accompagnant ma grand-mère au début des années 60, j’avais rencontré sa « cousine d’Amérique ». Les trois dames partageaient leurs souvenir d’enfance au Relecq-Kerhuon.

Madeleine ROGERS et Charles BRYSON (1943)

Madeleine, fille d’Annette et William, a eu l’équivalence du baccalauréat en 1939. Son cadeau devait être un voyage en Europe pour rendre visite à ses cousins et cousines. Malheureusement, en raison de l’instabilité des conditions politiques en Europe, cela n’a pas pu se faire.

Madeleine s’est mariée en 1943 avec Charles Francis BRYSON. La noce était prévue dans le Massachusetts, mais Charles (qui avait été enrôlé dans l’armée et se trouvait en service actif) ne pouvait pas se rendre dans le Massachusetts. Le mariage eu donc lieu en Louisiane dans ne base de l’armée.

De simple soldat, Charles a rapidement été promu lieutenant et responsable d’une unité de quatre chars d’assaut, avant d’être déployé en Europe. Son unité a débarqué à Omaha Beach, trois mois après le jour J (6 juin 1944). Charles et ses hommes ont vaillamment combattu lors de la bataille des Ardennes et ils ont sauvé la ville de Hotton (Belgique) de sa totale destruction par les allemands. Une fois la guerre terminée, Charles a fait carrière dans les assurances. Après le lycée, Madeleine a été vendeuse mais durant la plus grande partie de sa vie, elle a été mère au foyer.

Annette KERJEAN avec les aînés de ses petits-enfants vers 1957

Le couple a eu deux filles (Nancy et Mary Elizabeth), et trois garçons (William, Kevin et John). Tous se sont mariés et ont donné onze petits enfants à Charles et Madeleine.

Quand Annette revenait de France, elle rapportait toujours des cadeaux. Nancy et Mary Elizabeth se souviennent qu’une fois, elle leur a rapporté des poupées bretonnes en costume (voir ci-contre). Elle leur ramenait aussi des barrettes pour les cheveux qu’il était impossible de trouver aux Etats-Unis.

Dans les années 50, Annette et William habitaient Sommerville dans le Massachusetts. Après que Williams ait fait valoir ses droits à la retraite, le couple a acheté sa première maison à Attleboro, toujours dans le Massachusetts. Annette travaillait encore à cette époque et elle prenait le train tous les jours pour se rendre à son travail à Boston. Excellente couturière, elle occupait son temps libre à faire des robes pour ses deux petites filles.

Pierre tombale d’Annette et William
à Canton dans le Massachussets

Après le décès de William, en 1972, Annette est venue une dernière fois en France et plus particulièrement en Bretagne voir ses sœurs. Elle est décédée en 1985 (voir la pierre tombale du couple, ci-contre).

Leur fille Madeleine, et leur gendre, Charlie, sont décédés en 2008 et 2006, respectivement.

Arbre descendant des parents d’Annette KERJEAN (provisoire)

Sources principales :

  • Delphine FAMCHON et Catherine PICHON, arrière-petite-fille et petite-fille de Jeanne KERJEAN, respectivement ;
  • Nancy BRYSON, petite-fille d’Annette (qui m’a aussi aidé à traduire la présente page en anglais) ;
  • Josiane LE GOFF, petite-fille de Louis KERJEAN ;
  • Monique BOENNEC, belle-fille de Madeleine KERJEAN.