Techniques supposées pour réaliser des crop circles

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Lunettes à réalité augmentée (photo Université du Texas)

J’ai réfléchi à la manière dont le crop circle de la ferme Ansty a pu être réalisé. Je laisse de côté l’outil qui a servi à coucher le blé. Ce peut-être une planche en bois, un bâton… là n’est pas le plus difficile. Ce qui m’intéresse, c’est comment les artistes ont visualisé les limites entre les zones où le blé devait être couché et celles où il devait resté dressé.

Je pense avoir trouvé. Deux techniques ont été utilisées conjointement : la géolocalisation par GPS différentiel et des lunettes à réalité augmentée.

Le GPS de base – celui de nos smartphones, par exemple -, n’est pas suffisamment précis pour permettre le positionnement nécessaire à la réalisation d’un agroglyphe complexe du type de celui de la ferme Ansty (cf. article précédent). Les artistes ont donc du utiliser un GPS différentiel (DGPS). La technique consiste à corriger les positions du récepteur GPS grâce à celles calculées par une balise GPS fixe installée dans le voisinage. Les corrections sont transmises par radio.

Le GPS différentiel est d’ailleurs utilisé en agriculture : de nos jours, des engins agricoles sont capables de travailler les champs en pilotage automatique. Le GPS différentiel est aussi utilisé pour la circulation aérienne et automobile : voitures Google et Tesla, par exemple.

Le positionnement est une chose, reste à comprendre comment les artistes ont visualisé les zones où le blé devait être couché et celles où il devait être laissé intact. Il y a de fortes chances pour qu’ils aient utilisé des lunettes à réalité augmentée.

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Simulation de ce que peut voir un créateur d’agroglyphe à travers des lunettes à réalité augmentée

Les lunettes à réalité augmentée liées à un positionnement par GPS différentiel sont aujourd’hui une réalité ;o) . Elles sont, par exemple, proposées pour visiter certains sites archéologiques (cf. l’archeoguide).

Imaginez le dessin des zones se superposant à la vision du terrain grâce à ces lunettes. J’ai essayé de représenter ci-contre ce que voit l’artiste. Je ne suis pas encore très doué dans l’utilisation de Gimp mais je pense que cela donne une bonne idée de ce que voit l’opérateur. Les traces sont censées être au sol.

Un magnifique crop circle dans le sud de l’Angleterre

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Crop Circle de la ferme Ansty (12 août 2016) (photo mrgyro.co.uk)

Le 12 août dernier (2016), la présence d’un magnifique crop circle dans la propriété Ansty près de Salisbury, dans le Wiltshire, a été révélée. Mesurant une centaine de mètres de diamètre, il s’agit probablement d’un des plus beaux agroglyphe jamais réalisés. Immédiatement, les céréologues – c’est ainsi qu’ils s’appellent -, ont avancé qu’en raison de sa complexité, il ne pouvait pas avoir été réalisé par des humains.

Il s’avère que la région est celle où, depuis les années 70, les apparitions de crop circles ont été les plus nombreuses. Le Wiltshire et le Hampshire sont considérés comme étant le berceau des crop circles. Stonehenge, situé à moins de 25 km de la ferme Ansty, étant aussi selon certains, l’œuvre d’extra-terrestres, la région est propice à leur présence.

Très vite, il est apparu que ce crop circle était en fait le logo d’une société américaine, Mothership Glass, qui commercialise des pipes à eau en verre, à la seule différence que les lettres composant le nom de la société sur le pourtour du logo, ont été remplacées par des symboles… symboles qui d’ailleurs se trouvent sur les pipes de la société.

Du coup, l’agroglyphe d’Ansty a été qualifié de faux crop circle par les céréologues, puisque réalisé par des humains. Il s’est avéré qu’il a fallu trois jours – et non pas une nuit -, pour le réaliser, et ce, avec la complicité des propriétaires du champ qui étaient partis en vacances. Ceux-ci ont, bien entendu, été dédommagés. Ils n’ont d’ailleurs pas hésité à faire payer l’entrée de leur champ aux visiteurs dans les jours qui ont suivi.

Les céréologues ne nient pas que certains crop circles sont réalisés par des humains. Ils pensent même que 80% le sont. Mais ils pensent aussi, que ceux-ci qui les réalisent ont pour but de les décrédibiliser. Cette croyance est courante dans d’autres domaines pseudo-scientifiques.

En 1991, deux fermiers anglais, Doug Bower et Dave Chorley revendiquèrent la plupart des agroglyphes réalisés dans la région d’Avebury (44 km de la ferme Ansty) depuis 1978. Dans un reportage diffusé sur Arte, ils montrent comment ils procédaient, armés d’une planche de bois, d’un bâton et d’une corde. Il va sans dire que la technique a évoluée depuis : l’agroglyphe de la ferme Ansty ne peut pas avoir été réalisé de cette manière.

Les agroglyphes s’apparentent à du land art mais les circle makers gardent secret leurs techniques. L’anonymat avec lequel ils procèdent s’apparente un peu à ce que fait Bansky dans le domaine du street art. Ceci dit, personne n’a jamais clamé que Bansky était un extra-terrestre.

Dans les années 90, le collectif Circlemakers Arts a réalisé plusieurs œuvres de manière non anonyme. En 1998, l’une d’elle, relativement complexe et réalisée en Nouvelle Zélande, de nuit, en quatre heures de temps, a fait l’objet d’un documentaire diffusé partout dans le monde.

L’agroglyphe d’Ansty n’est pas le premier à être utilisé comme support publicitaire. Parmi eux, on peut citer le logo de Firefox, en 2006 dans l’Oregon (70 mètres de diamètre), et le dessin du processeur Tegra K1 de la société Nvidia, fin 2013 dans la Salinas Valley en Californie (100 mètres de diamètre).

Il est peu probable que l’agroglyphe d’Ansty soit l’œuvre de Doug Bower et Dave Chorley mais on peut penser que ceux-ci ont fait des émules dans la région et que les meilleurs artistes dans le domaine, s’y trouvent toujours.

La photo ci-jointe est extraite du site Crop Circle Connector qui collecte les informations sur les agroglyphes. De nombreuses autres photos sont visualisables sur la fiche consacrée à l’agroglyphe de la ferme Ansty.